jeudi 20 septembre 2018

Les filles, toujours invisibilisées

Le saviez vous ? Dans les maternités, quand un bébé fille pleure, on va mettre statistiquement plus de temps à aller la voir que lorsqu'il s'agit d'un bébé garçon. Une fille, ça peut attendre. Une fille doit apprendre à passer après les autres. C'est ce qu'explique le professeur de sociologie Eric Macé, dans un webdocumentaire très éclairant sur la façon dont on traite la question du genre des enfants, Ecole du genre de Léa Domenach.

De la même façon, en moyenne, il a été montré qu'à l'école, les garçons ont deux fois plus la parole en classe que les filles. Quoi qu'il arrive, où que l'on regarde, les filles ont une fâcheuse tendance à être invisibilisées, mises de côté. C'est la même chose dans le sport, remarquent des adolescentes s'exprimant dans ce webdocu : il est facile d'accéder dans les medias à n'importe quelle compétition d'importance pour peu que ce soit d'équipes masculines qu'il s'agisse. Quand il est question des sportives féminines, c'est le trou noir. Or ce que l'on ne voit pas n'existe pas.

Le défi des filles dans le monde de 2018 reste de trouver leur place. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que celle qu'on leur assigne est petite et discrète. Aux garçons les grands terrains de foot ou de rugby - métaphore de la conquête de nouveaux territoires par les hommes - ou les sports d'affrontement comme la boxe et les arts martiaux - virilité quand tu nous tiens !-, aux filles les salles confinées de danse ou de gymnastique où elles devront contraindre leur corps pour qu'il devienne gracieux, souple, féminin et désirable donc. 

On espère les filles jolies, souriantes, gracieuses et talentueuses. On s'interroge quand elles veulent faire de la boxe plutôt que de la danse, qu'elles s'orientent vers des formations en mécanique plutôt qu'en littérature et on les abreuve dès leur petite enfance de récits de princesses délivrées par de courageux et magnifiques princes. J'y pensais hier quand, à la bibliothèque, ma petite dernière a souhaité emprunter un livre de la collection Mes p'tits docs sur les princesses. La bibliothécaire, qui commence à bien connaître ma fille et lui propose régulièrement des ouvrages plus aventureux, étonnée, lui dit : "toi, tu veux emprunter ça ? Ah bon..."



Mes p'tits docs, généralement, c'est quand même plutôt bien pensé, pédagogiques. Ce sont de chouettes livres à mettre entre les mains de ses enfants. Dans celui-ci, on rappelle la base : "Une princesse, c'est la fille d'un roi et d'une reine". Eh oui ! N'est pas princesse qui veut tout de même. Dans les contes, les fées se penchent sur les berceaux des princesses. Les princesses disposent de vastes garde-robes et on leur apprend les bonnes manières. Leur but ultime dans la vie : faire un super mariage avec un homme vaillant et trop beau avec qui elles auront plein d'enfants. Parce qu'il ne faut pas l'oublier : les princesses, une fois mariées, n'ont qu'un objectif en vue : avoir plein d'enfants.

Dans la vraie vie - par opposition aux contes, donc - les princesses ont un devoir de représentation. Elles doivent "essayer d'être parfaites". Elles font dans l'humanitaire, généralement, nous dit-on. Pas un mot dans ce petit livre sur les hommes qui partagent leur vie ni sur leur descendance en revanche... Au fond, les vraies princesses ont-elles quelque chose à voir avec celles des contes pour enfants ?

Bref, ma fille, inutile de focaliser trop longtemps sur les princesses. La semaine prochaine, on empruntera peut-être le p'tit doc sur la liberté ou celui sur les volcans.

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