Quand j'étais enfant, dans les années 80, je n'ai pas le souvenir que les jouets étaient aussi genrés qu'aujourd'hui. Lego n'avait pas scindé ses collections, pas plus que Playmobil. Il y avait d'un côté les Barbies et les bébés et de l'autre les petites voitures, certes, mais les jeux de société, par exemple, n'étaient pas sexuellement orientés.
Je n'ai pas le sentiment non plus d'avoir eu une enfance particulièrement girly. Avec mon frère aîné, nous faisions partie de ces enfants du village que l'on appelait le club de 5 : 2 filles, 3 garçons inséparables. On faisait ensemble beaucoup de vélo, on s'organisait des épreuves façon Intervilles ou Fort Boyard dans les granges du village, on allait en forêt, dans les champs, on faisait un peu de camping sauvage ensemble. Rien de très clivant sexuellement parlant.
Il est vrai que je pratiquais la danse et mon frère le foot quand l'inverse n'aurait pas été possible. A la campagne, ça n'existait pas et je veux bien parier que c'était guère différent en ville. Mais ceci mis à part, il n'y avait pas tant de sexualisation des jeux et activités des enfants qu'il y en a aujourd'hui.
En cherchant à vérifier cette intime conviction, je suis tombée sur les travaux de la sociologue américaine Elizabeth Sweet selon qui, en effet, à mesure que les enseignes de jouets ont cherché à maximiser leurs ventes et donc leurs profits, leur procédé a consisté à segmenter leurs offres. Le choix, généralement, s'est opéré via une différenciation en rose et bleu, ce que l'on observe partout, chez Lego, chez Playmobil mais aussi chez Vtech ou même au sein de la gamme d'armes Nerfs :
Bon, d'accord, chez Nerf, on intègre un peu de orange et de vert pour les garçons et du violet pour les filles.
Banco : en élaborant des gammes "couleurs garçon" et des gammes "couleurs fille", les marques ont augmenté leur chiffre d'affaires. Un reportage du journal de France 2, en décembre dernier, développait cet argument :
Comment cependant, en tant que consommateurs, en finir avec ça ? Je peux tout à fait offrir un clavier électronique bleu à ma fille, ou un bébé rose à mon fils mais ce n'est pas possible pour tout. Par exemple, la boite de Lego boulangerie fait partie de la collection "friends" et donc, en "couleurs fille". Elle n'existe pas dans la collection Lego city "couleurs garçon". Si donc ma fille se passionne pour la boulangerie, je ne peux que lui offrir sa boite en couleurs fille, je ne peux pas la lui acheter en bleu ou en couleurs non connotées. Une écrasante somme de jouets est "marketée" de la sorte. De la même manière, dans la plupart des boites, vous trouverez au choix des personnages féminins ou masculins mais assez rarement des personnages des deux sexes (sauf dans les cas qui associent maman et enfants).
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