Ce mardi 24 février 2020 restera marqué du sceau de la parole des femmes enfin entendue. Lors de son procès new-yorkais, l'ex-producteur de cinéma, celui qui soufflait le chaud et le froid sur le tout Hollywood des dernières décennies, a été reconnu coupable de viols. Harvey Weinstein ne violera plus de femmes, il ne pourra plus abuser de qui que ce soit. La sentence ne sera tranchée que le 11 mars prochain, mais selon toutes vraisemblances, il devrait être condamné à plus de vingt ans de prison. D'autant qu'un second procès l'attend prochainement à Los Angeles.
On remarquera que le titan est tombé de son pied d'estale, qu'il n'arbore plus la superbe qui le caractérisait. Il est vraisemblablement malade, c'est incontestable, mais il use de cette image de vieil homme souffrant comme pour amadouer le jury. Il est apparu grandement amaigri au tribunal, le visage marqué, ne se déplaçant que grâce à un déambulateur. On est bien loin de l'homme omnipotent qui posait, fier et le menton haut, sur les tapis rouges du monde entier.
Harvey Weinstein, 24 février 2020, photo Reuters / Lucas Jackson |
Pour Michelle Simpson Tuegel, une avocate américaine représentant des victimes d'agressions sexuelles, cette condamnation de Harvey Weinstein est un signal fort. Selon elle, "quel que soit le pouvoir d'une personne, quelle que soit la quantité de boue et de saleté projetée sur ceux qui ont le courage de se manifester, nous sommes dans une ère nouvelle. L'ère #MeToo a commencé à démasquer ces systèmes d'abus de pouvoir, et maintenant les femmes peuvent être entendues et crues".
Si l'on peut croire en cette ère nouvelle permettant aux femmes de dénoncer agressions et viols, il est cependant illusoire d'envisager la fin des abus de pouvoir. Le cas Weinstein en est d'ailleurs l'exemple. Il est aujourd'hui reconnu coupable de viols, mais ne concernant que deux femmes, parmi les 90 qui l'accusent ! Il est condamné pour ces deux cas mais le tribunal n'a pas reconnu le caractère aggravant de "prédation". De plus, à ce stade, rien ne semble possible pour tous ces histoires de chantage qu'il a pratiqués. Il a obtenu ce qui apparaît comme des consentements de la part de jeunes femmes qui souhaitaient faire carrière dans le cinéma contre promesses de rôles dans des films. Dans ces affaires-là, la justice ne reconnaîtra pas des viols mais il n'y a pas besoin de faire appel à beaucoup d'intelligence pour comprendre qu'il y avait clairement et implicitement abus de pouvoir. Il y a pourtant fort à parier que ces actes abjectes ne pourront pas être jugés, que Weinstein ne sera pas condamné pour cela. Que dire aussi de tous ces proches de l'ex-producteur qui savaient, qui n'ont rien dit et pire, ont laissé faire ? De ces avocats qui achetaient le silence des victimes de Weinstein ? Il y a l'accusé, le coupable. Et il y a toute sa cour... Que dire d'eux ? Si sa condamnation apparaît comme un soulagement pour beaucoup, le bilan demeure en demi-teinte. La Justice n'a pas su aller au bout du processus et prendre à bras-le-corps le défi qui se présentait.
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