jeudi 19 décembre 2019

Dora Maar, la femme qui pleure

Tant que l'on ne s'y intéresse que furtivement, ce que l'on sait de Dora Maar, c'est qu'elle fût des années durant la maîtresse et la muse de Pablo Picasso. Qu'elle est et restera la "femme qui pleure". Point. A la rigueur, on sait qu'elle fût photographe et peintre.

Pour tout dire, j'en étais à peu près là de mes connaissances avant de tomber sur le livre de Brigitte Benkemoun paru cette année, "Je suis le carnet de Dora Maar". Dans cet ouvrage, l'auteure raconte la vie de Henriette Theodora Markovitch au travers de son carnet d'adresses de l'année 1951. On ne sort pas de cette lecture indemne. Il y est question de personnalités des arts du siècle passé, tout comme il y est question d'amour, de cruauté, d'hypocrisie, de religion. Et du destin d'une femme hors du commun qui, d'une jeune femme au talent photographique incroyable pour l'époque, aux idées politiques tournées à gauche - quoiqu'issue d'un milieu bourgeois - et à la personnalité bien trempée lorsqu'elle rencontre Picasso au début des années 1930, devient en quelques années une femme tourmentée, seule, décriée, aux idées fascistes et viscéralement tournée vers la religion.

Pablo Picasso et Dora Maar


De la lecture de ce livre, on ressort estomaqué par la méchanceté dont a pu faire preuve Picasso à l'égard de cette femme qu'il a pourtant adorée. On mesure combien certains se sont servis d'elle pour approcher le maître. On constate que sa relation avec Picasso a étouffé, au moins un temps, ses talents. Brigitte Benkemoun écrit : "Elle fut l'amante et la muse de Pablo Picasso, rôle qui a éclipsé l'ensemble de son oeuvre. Cruelle postérité qui ne retient que la maîtresse, et enterre toute une oeuvre à l'ombre d'un géant. Cruelle mais sans appel. Qui connaît l'oeuvre de Dora Maar ? Qui se souvient qu'elle a été l'une des rares femmes photographes admises parmi les surréalistes ? Qui sait qu'elle a consacré soixante ans de sa vie à la peinture ?"

La femme qui pleure, de Pablo Picasso


Quand Picasso la quitte pour Françoise Gilot, elle sombre dans la dépression, dont elle sort grâce à Lacan, grâce à Dieu - puisqu'aucun homme ne pourrait détrôner Picasso à ses yeux, alors autant s'en remettre à Dieu - et grâce à la peinture. Mais elle n'intéresse plus. Ou si peu. Finis les agendas mondains, fini le Paris des arts et de la culture, elle passe de plus en plus de temps seule dans le Lubéron, avec un quotidien rythmé par les prières et la peinture.

L'été passé, le centre Pompidou lui a consacré une exposition, présentée ici :



Et puis il reste la littérature, au travers donc de ce livre étonnant de Brigitte Benkemoun :





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