lundi 5 mars 2018

Zone grise : elles n'ont pas dit non. Mais elles n'ont pas dit oui non plus.

Mis en ligne sur Youtube il y a 3 jours seulement, le documentaire a déjà été visionné plus de 12.000 fois. "Sexe sans consentement" est un film écrit par la journaliste Blandine Grosjean. Il y est question de cette "zone grise" entre le viol et le consentement. "Depuis toujours, il arrive à des jeunes femmes de ne pas consentir à des rapports sexuels et d'y céder malgré tout". Ce n'est pas franchement un viol, il n'y a pas d'agression au sens "traditionnel" du terme, pas de coups, pas de menaces. Mais ce sont ces situations où des filles ont, souvent dans le silence et la passivité, subi l'acte sexuel. Souvent, elles n'ont pas dit non. Mais elles n'ont pas dit oui non plus. Elles sont restées figées, muettes, totalement passives et tétanisées. Incapables de réagir.

Normalement, si le gars a un soupçon de jugeote, il doit comprendre qu'il y a un truc qui ne va pas, témoigne l'une des jeunes femmes du documentaire. Oui mais non. Il ne le comprend pas, ne le voit même pas. Il n'est pas nécessairement agresseur. Il n'a juste pas compris que la fille qu'il a devant lui n'a pas du tout envie de lui. 

Ca passe ou ça casse. 
Des histoires de ce type, toutes les femmes en ont vécu, avec plus ou moins de séquelles. Certaines les enfouissent loin, très loin, d'autres passent tout simplement à autre chose, sans autre forme de procès. Mais pour certaines, ces "mésaventures" sont le terreau d'un mal-être  difficile à résorber.

Visuel "Sexe sans consentement" - Floriane

 Selon Blandine Grosjean, "22% des hommes et 17% des femmes considèrent que lorsqu'une femme dit non, elle veut dire oui". Partant de là, le malentendu est évident. Peu à peu, les jeunes femmes qui ont apporté leurs témoignages pour ce film déroulent le fil de leurs histoires. Certaines se sentent mêmes fautives, comme responsables de ce qui leur est arrivé. Floriane raconte avoir d'abord accepté un verre, une cigarette, avoir pris le métro avec ce jeune homme, être allée chez lui, dans son appart en colocation où d'autres personnes étaient présentes. Elle a cherché à le repousser, gentiment, poliment et au final, lui a cédé. "Je n'ai pas compris qu'il ne comprenne pas ce que je lui disais", analyse-t-elle. "Il faisait comme si je n'avais rien dit". Alors elle se dit qu'il vaut mieux faire vite ce qu'il veut, oublier, vite, plutôt que de s'opposer car dans ce cas, peut-être que la situation pourrait dégénérer.

Une autre jeune femme considère que "le non ne suffit pas, il faut expliquer pourquoi tu ne veux pas". Les garçons ne seraient pas à même de son point de vue d'accepter qu'on leur refuse ce qu'ils demandent. De la même façon que les personnes auxquelles ces jeunes femmes confient leurs histoires rétorquent souvent : "Tu es sûre que tu ne voulais pas?"

Dans le cas de Natacha, si elle a choisi de ne pas porter plainte contre l'homme qui a abusé d'elle, il lui aura fallu plusieurs années de boulimie et de recours à un psychiatre avant d'être capable de dire qu'elle avait été violée. D'employer ce mot. "J'avais l'impression d'usurper une place de victime à laquelle je ne pouvais pas prétendre". Quand ça lui est arrivé, elle participait à un festival, elle avait un peu bu. Comment si ça pouvait justifier que l'on abuse d'elle en toute bonne conscience. Elle ne voulait pas coucher avec ce garçon mais n'a pas su s'y opposer vraiment. "Maintenant que tu m'as allumé, faut assumer", lui avait-il dit.

Visuel Sexe sans consentement - Natacha

 "Depuis quelques années, de plus en plus de jeunes filles et de femmes exigent qu’on sorte de cette zone grise. Pour certaines d’entre elles, il n’y a pas trois voies : le « vrai » viol, le « vrai » consentement et « le truc entre les deux ». Il y a viol ou pas. Accepter « le truc entre les deux », c’est cautionner la culture du viol", écrivait Blandine Grosjean dans les colonnes du Monde il y a quelques semaines (lire ici ). Dans son documentaire, elle avance pourtant que "21% des français(e)s estiment que lorsqu'une personne cède quand on la force, il n'y a pas viol". Mais alors, si ce n'est pas un viol, qu'est-ce que c'est ?


Le documentaire sera diffusé sur France 2 ce mardi 6 mars à 22h55. Il peut aussi être visionné sur Youtube. C'est ici : Sexe sans consentement.

Lire aussi :

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire