vendredi 4 septembre 2020

Violences faites aux femmes : le dire et le faire

200 000 viols commis en France chaque année, auxquels s'ajoutent les dizaines de milliers de femmes victimes de violences conjugales, de harcèlement, d'agressions. Les chiffres sont têtus, la réalité des faits triste à pleurer.

Et pourtant cette semaine, le premier ministre Jean Castex, avec ses airs bonhommes, a discouru gentiment sur cette "belle cause de société" qu'est la lutte contre les violences faites aux femmes. Ces violences, dit-il, sont un "scandale"... Mais qui donc écrit ses discours ???

De même, il appelle les femmes victimes de violences à "saisir les autorités de l’État", au cas où elles n'auraient pas eu l'idée de le faire par elles-mêmes. Il leur dit : "n'hésitez pas sortir de l'ombre, à sortir de la condition indigne qui vous est faite, vous serez accueillies. Les auteurs de violence seront poursuivis sans relâche". Sans relâche ? Est-ce bien sûr ? Pour mémoire, en France, seules 10% des plaintes enregistrées pour viol sont jugées en cour d'assises, auquel cas l'auteur du viol encourt une peine de 15 ans. Pour les autres, pour tout un tas de raisons, les plaintes n'aboutissent pas ou bien sont requalifiées en "agression sexuelle", ce qui ne se juge pas aux assises mais au tribunal correctionnel, et alors les coupables encourent une peine de 5 ans.

 



Pour ce qui est des violences conjugales, on sait combien les femmes qui en sont victimes sont généralement sous l'emprise psychologique et/ou financière de leur conjoint, à quel point elles sont démunies et peinent à aller au bout des plaintes qu'elles réussissent parfois à déposer.

On ne doute pas de la sincérité du premier ministre lorsqu'il assure que les auteurs de violence seront poursuivis sans relâche. Il pense très certainement ce qu'il dit. Il souhaite sans aucun doute que ce soit le cas. A ceci près qu'il n'en est rien. Ce n'est pas ce qui se passe dans la réalité.

Et ce n'est pas le rapport parlementaire publié au beau milieu de l'été, quand personne n'avait l'oreille suffisamment attentive pour y prêter attention, qui contredira cet état de faits. En effet, les sénateurs Arnaud Bazin et Eric Bocquet ont  rendu un rapport d'information sur le financement de la lutte contre les violences faites aux femmes dont on ne peut pas tellement dire qu'il dresse des lauriers au gouvernement et à Marlène Schiappa. Pour faire court, il en ressort que les moyens financiers vantés par l'ex-secrétaire d’État pour l'égalité femmes-hommes étaient un tour de passe-passe, de l'affichage pur et simple, de l'effet d'annonce. Les budgets soit disant alloués à ce sujet étaient en fait fléchés ailleurs, il s'agissait de crédits que l'on avait décidé de redéployer. On apprend même que, sur l'enveloppe annoncée d'un milliard d'euros pour cette cause de la lutte contre les violences faites aux femmes - euros que l'on est donc allés piocher à droite à gauche, déshabillant Paul pour habiller cette cause - 75% ont été dépensés à l'international, contribuant à des programmes de l'Unicef ou de l'Onu Femmes, par exemple. On ne critiquera évidemment pas le caractère essentiel de l'investissement de la France auprès de telles institutions, ce n'est pas le propos. Mais quid des moyens alloués à la lutte contre les violences faites aux femmes en France ? De quoi dispose-t-on ? Comment améliore-t-on leur prise en charge ? Comment forme-t-on les professionnels de la police et de la justice dans ce domaine ?

Jean Castex aura beau, la main sur le cœur, encourager les victimes à venir porter plainte, s'il ne met pas sur la table des moyens financiers et humains pour aider ces femmes, il ne parviendra à rien.

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