vendredi 17 janvier 2020

Violences sexuelles : quand la presse se fait putaclic

54100, c'est le nombre de faits de violences sexuelles enregistrés par les services de police et de gendarmerie au cours de l'année 2019 en France. Ce chiffre, bien que très lourd, n'est sans doute que la partie émergée de l'iceberg. Il reflète les cas dénoncés de violence sexuelle et masque par définition toutes les violences que les femmes - et les hommes - subissent en silence.

Néanmoins, ce chiffre est en augmentation. Les statistiques du ministère de l'Intérieur font état par exemple d'une augmentation de 19% du nombre de viols enregistrés dans le pays entre 2018 et 2019. Le nombre de cas de harcèlement dénoncés aurait quant à lui progressé de 8%.

Selon toutes vraisemblances, cette augmentation du nombre de plaintes a à voir avec la mobilisation de la société sur ces sujets, avec la médiatisation d'affaire telles que Weinstein, Epstein et autres joyeux lurons de leur acabit,...

Pour autant, il est primordial d'insister sur le fait que cette hausse remarquable du nombre de plaintes ne signifie pas, contrairement à ce que publie honteusement le journal Le Parisien, que les violences sexuelles sont en augmentation. Le quotidien titre en effet dans ses colonnes : "Forte hausse des violences sexuelles en France en 2019" . Un titre putaclic par excellence ! Oser faire un tel raccourci, c'est vouloir faire peur dans les chaumières, agiter un chiffon rouge. C'est dangereux et malsain.

Copie d'écran du site internet du Parisien, ce 17 janvier 2020

Il ne faut pas laisser croire que, parce que le nombre de plaintes augmente, cela signifierait que la société est plus violente à mesure que les années passent. Ce que ce nombre croissant de plaintes signifie plutôt, c'est qu'il est aujourd'hui admis que ces violences sont intolérables, qu'elles doivent être dénoncées et sanctionnées. Cela signifie que dans le monde d'aujourd'hui, les femmes n'acceptent plus le sort qui leur est fait. Cela signifie que la Justice doit passer, que ces femmes doivent être entendues et protégées. Mais cela ne signifie pas que les hommes sont plus violents que par le passé. Il n'est pas admissible de sous-entendre cela. Les mots ont un sens et les medias ne doivent pas éluder leur responsabilité ni jouer dans la surenchère.

Lire aussi :
- Violence et inégalités entre les sexes : l'oeuf et la poule
- Adèle Haenel : "le silence est une immense violence"
- Quand la violence s'empare du prime time
- Violences domestiques : comme un goût de trop-plein

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire