Hier jeudi, la secrétaire d'Etat à l'égalité femmes-hommes était l'invitée de Léa Salamé et Nicolas Demorand sur France inter. Entre autres sujets d'actualité, il a été question d'un tweet qu'elle avait publié la veille :
Quand on est une femme en politique, dit-elle, il n'est pas rare d'être "la cible de menaces de mort, d'appels haineux et menaçants, injurieux". Depuis son arrivée au gouvernement, elle a plusieurs eu à porter plainte. Mais la dernière série a été la goutte d'eau. Si jusqu'ici elle ne publiait pas les injures qu'elle recevait, elle a changé son fusil d'épaule. "Ne rien dire, c'est couvrir", estime-t-elle désormais. De fait, lit-on sur son fil Twitter, les messages dont elle est destinataire sont d'une gravité et d'une vulgarité incroyables. Florilège (je laisse les fautes d'orthographe...) :
- "vous ferez mieux de continuer a sucé des bites eu lieux d'ouvrir la bouche pour dire de la merde grosse salope"
- "vous méritez de vous prendre un flash ball en pleine tête"
- "le peuple réclame le retour du droit de cuissage"
- ...
Y aurait-il une "jubilation particulière à humilier les femmes" ?, demande Léa Salamé. Absolument, selon Marlène Schiappa qui observe qu'un homme, "on va l'insulter sur ses idées", on va débattre. Quand il s'agit d'une femme, il va s'agir de la sexualiser. Et la secrétaire d'Etat d'affirmer qu'elle est l'objet d'appels au viol, de menaces de sévices sexuels.
Pourquoi cette distinction dans le champ lexical utilisé selon que l'on s'adresse à un homme ou une femme ?
Quand ce sujet est soulevé - pourquoi Schiappa est à ce point insultée, de cette façon-là ? -, il y a toujours des voix qui s'élèvent pour dire qu'au fond, elle l'a bien mérité vu le nombre d'inepties qu'elle raconte. Eh bien non. Toutes considérations politiques mises à part, rien ne justifiera jamais des appels au viol, des insultes obscènes et autres joyeusetés dont elle est l'objet. Comment peut-on ne serait-ce que comprendre cette déferlante de haine sur fond sexuel ? Aucun homme politique ne reçoit jamais ce type d'insultes ou de menaces. Au prétexte qu'elle est une femme, de moins de 50 ans qui plus est (voir article publié hier : La péremption des corps ), elle devrait accepter ce retour de bâton ? Certains vont jusqu'à dire que si elle ne voulait pas subir ce type de messages, il ne fallait pas entrer en politique. On croit rêver. Pourquoi serait-ce un passage obligé ? D'aucuns estiment que c'est parce que Marlène Schiappa n'aurait pas sa place en politique que cela justifierait ces insultes. Mais savent-ils que Simone Veil, en son temps, recevait les mêmes ?
Tant que l'on acceptera ce type d'insultes, il sera difficile de faire avancer le sort des femmes au sens large dans la société. Tant que les personnalités publiques féminines verront leur dignité bafouée de la sorte, nous aurons à nous inquiéter de celle de nos filles. Rien ne justifiera jamais que l'on réduise les femmes aux promesses supposées de leur corps et que l'on menace leur intégrité physique au moindre faux pas. Rien. Jamais.
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