jeudi 4 février 2021

Violences sexuelles : ça ne s'arrêtera donc jamais ?

Après l'affaire Duhamel, c'est reparti pour un tour : l'acteur Richard Berry est accusé d'inceste par sa fille Coline. Et ça ne s'arrête pas là. Le producteur de télévision Gérard Louvin est aussi accusé d'inceste. Histoire de parfaire le tableau, on apprend que Gabriel Matzneff a lancé un appel à souscription auprès d'éditeurs pour publier sa version des faits dans l'histoire avec Vanessa Springora, livre qu'il intitule "Vanessavirus". A ce stade, aucun éditeur n'a indiqué soutenir Matzneff dans ce projet.
L'homme politique François Asselineau a de son coté été mis en garde à vue pour agressions sexuelles, tandis que le chanteur Marylin Manson est accusé par plusieurs femmes de viols.
 
 
Encore et toujours, ces histoires concernent des personnalités publiques. En février 2018, la philosophe et féministe Geneviève Fraisse évoquait ce sujet, dans les colonnes du Nouveau magazine littéraire. Elle se rappelait du mouvement féministe des années 70, dont les détracteurs accusaient les militantes de n'être au fond que des bourgeoises, donc pas nécessairement représentatives de la population. Avec #MeToo, il semblait qu'un parallèle puisse se faire : les premières à parler étaient les femmes connues, médiatiques. "Qui a les moyens de mener les premières batailles?", demandait Geneviève Fraisse. Assurément, ce sont celles qui ont la possibilité de le faire. Elles deviennent alors des porte-étendards, elles lancent le mouvement, initient la révolte. Les #MeToo et #MeTooInceste servent à cela, à tendre des perches, et poursuivre le combat, à permettre aux anonymes victimes de ne plus se sentir seules, à se dire qu'elles aussi peuvent parler. Ne plus se taire, ne plus laisser les hommes violeurs dispensés de rendre des comptes. 

 

Il y a quelques jours, la journaliste Victoire Tuaillon tweetait : "je sais que c'est dur de regarder ce fait incontestable en face mais il faut le faire si on veut s'en sortir un jour : les personnes qui violent sont des hommes. De tout âge, toute classe, tout profil - le seul point commun des violeurs, c'est d'être des hommes". Pour ce message, Victoire Tuaillon a été suspendue par Twitter pendant 12h. On pourrait considérer que c'est anecdotique. Ce n'est pas grave, on peut passer 12h sans poster de tweet, on n'en meurt pas. Sauf que voilà : la journaliste n'a pas écrit "les hommes sont des violeurs". Elle a écrit : "les violeurs sont des hommes", ce qui, statistiquement est incontestable. 98% des personnes condamnées pour viol sont des hommes. 

Une femme qui écrit ce message reposant sur un fait vérifié et officiel est mise sous silence par Twitter. Pourtant, en parallèle, pleuvent en continu des messages émanant d'hommes qui s'avèrent profondément sexistes et misogynes, qui constituent des appels à la violence à l'encontre des femmes... Cette réalité induit nécessairement une pratique du silence de la part des femmes. Aussi les témoignages des victimes de Richard Berry, Gabriel Matzneff, Marylin Manson et tant d'autres sont-ils essentiels à la prise de parole des victimes anonymes. Certains s'offusquent et considèrent que Coline Berry et Vanessa Springora devraient régler leurs histoires devant la justice et pas par voie médiatique. Or, la médiatisation de leurs histoires est un encouragement important pour les anonymes. Elles sont essentielles.

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