lundi 23 mai 2022

" Est-ce que la question des femmes vaut moins que des homards ? "

Vendredi, un nouveau gouvernement était annoncé. Et dans la foulée, voilà qu'une nouvelle affaire de violences sexuelles éclate. En cause, le tout nouveau ministre des Solidarités, transfuge des Républicains, Damien Abad. L'homme est accusé de viol par deux femmes. L'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique a alerté le parti des Républicains mais aussi Renaissance. Cela n'a pourtant pas empêché Elisabeth Borne de le nommer au gouvernement, laquelle clame qu'elle n'était pas au courant de ces accusations. J'ai peine à croire qu'aucune enquête ne soit engagée sur les personnalités que l'on envisage de nommer au sein d'un gouvernement français. Mais admettons. Ce week-end, la première ministre a assuré : "il ne peut y avoir aucune impunité et il faut continuer à agir pour que les femmes qui peuvent être victimes d'agression, de harcèlement, puissent libérer leur parole, qu'elles soient bien accueillies pour déposer plainte". On attend donc, parce que ces paroles ne doivent pas rester en l'air, l'annonce de la mise à l'écart du gouvernement de cet homme. 

Bien évidemment, il est présumé innocent. Mais dans un État digne de ce nom, toute personnalité publique devrait systématiquement être mise à l'écart le temps de prouver son innocence. Dans un État digne de ce nom, il ne saurait être accepté que des membres du gouvernement se trouvent dans une position où l'on n'est pas en mesure d'avoir confiance en eux. Comment accepter d'avoir un ministre des Solidarités incriminé ? D'ailleurs, si le principe même de solidarité lui tient à cœur, il devrait de lui-même se mettre en retrait.

 

Ce matin, en allumant ma radio, j'entends Olivier Faure, premier secrétaire du PS, interrogé par un auditeur sur ce sujet, qui s'exprime ainsi : "Il y a quelques années, il y a un ministre qui a été démissionné parce qu'il avait mangé du homard (il s'agit de François de Rugy. Pour mémoire, lire ou relire : Cherchez la femme). Bon, c'était pas bien. M'enfin, est-ce que la question des femmes vaut moins que les homards ? Est-ce que les femmes, leur parole peut être entendue ou pas ?"

Est-ce que la question des femmes vaut moins que des homards ? Peu importe que ce soit Olivier Faure qui prononce ces mots. C'est assez anecdotique. Je découvre d'ailleurs après coup que Caroline de Haas a utilisé quasiment la même expression hier. Mais la formulation fait mouche. Est-ce que la question des femmes vaut moins que des homards ? Tout est là. Qu'est-ce qui est acceptable de la part d'un ministre du gouvernement ? Avoir des frais de bouche conséquents à la charge du contribuable, ce qui, reconnaissons-le, bien que moralement très discutable, n'est pas fondamentalement illégal ? Ou être accusé de viols ? Dans la France du 21è siècle, qui se targue de faire de la lutte contre les violences faites aux femmes une priorité, on accepte donc sans sourciller qu'un ministre soit visé par des plaintes pour agressions sexuelles...


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