Depuis quelques années, il m'arrive d'intervenir dans des écoles pour faire de l'éducation aux médias. Ce que je préfère, c'est encourager les enfants à développer leur esprit critique face aux informations dont ils sont constamment abreuvés. Soit dit en passant, il me semble que l'éducation aux médias devrait faire partie intégrante des programmes d'éducation morale et civique (EMC, anciennement éducation civique). Comprendre et décrypter les informations que l'on reçoit est essentiel pour se construire en tant que citoyen, c'est pour moi une évidence. Mais passons.
Ce week-end, les medias ont tous présenté comme une bonne nouvelle le fait qu'à partir de ce lundi, nous allions tous laisser tomber le masque, collectivement. Les journalistes glissaient bien que le nombre de contaminations repartait à la hausse mais tous affichaient néanmoins une joie non-dissimulée sur l'accès que nous aurions tous, enfin, aux sourires des autres. Enfin, nous étions libérés, disaient-ils. Des reportages se multipliaient ça et là pour montrer que la population française n'attendait finalement que ça : la possibilité de jeter son masque. Hier matin, à la radio, j'entendais à nouveau des reportages dans des commerces où les gens se disaient heureux de pouvoir se libérer de cet accessoire déprimant qu'est le masque.
Pendant tout le week-end et jusqu'à hier matin, j'ai ressenti un certain malaise à ce sujet. Comment ça, les Français n'attendaient que ça ? Comment ça, c'était une bonne nouvelle que d'enlever son masque ? Pour ma part, quoique je ne sois ni paranoïaque ni hypocondriaque, pas plus qu'en mauvaise santé, je ne voyais pas trop en quoi c'était une bonne nouvelle d'enlever le masque alors que les contaminations restent trop nombreuses et que la Chine reconfine. Alors j'ai gardé mon masque. Et toute la journée d'hier, j'ai observé les autres. Que faisaient-ils ?
J'ai été plus que surprise de découvrir qu'une grande majorité des personnes que je croisais portaient toujours le masque. Comme si rien n'avait changé. Au fond, ce qui était martelé dans les medias comme une bonne nouvelle n'était pas suivi d'effet. En tout cas pas de façon évidente. Alors que les medias et le gouvernement nous avaient annoncé un lendemain qui chante, les gens restaient sur leurs gardes. Etonnant. La population se montrait prudente, elle ne répondait pas à l'injonction, elle faisait preuve d'esprit critique et de discernement.
A la faveur de ma veille médiatique quotidienne, je tombe ce matin sur ce témoignage d'un enseignant de collège qui, manifestement ému, raconte que le sachant vulnérable face au Covid, tous les élèves de toutes ses classes "se sont concertés et ont décidé de garder le masque" pendant ses cours. Le lendemain qui chante, ce n'est pas cette possibilité de laisser tomber le masque. De mon point de vue, le lendemain qui chante, c'est cet espoir que chacun cesse de répondre aux injonctions et fasse ses propres choix, en responsabilité, en tenant compte de son environnement. Le lendemain qui chante, ce sont ces adolescents qui collectivement, intelligemment, décident de garder le masque pour protéger leur enseignant.
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