Est-ce qu'un éboueur condamné pour viol serait en mesure de poursuivre son travail ? Je ne crois pas. Est-ce qu'un enseignant condamné de la même façon pourrait continuer de tenir sa classe ? Je ne crois pas non plus. Est-ce qu'un chanteur condamné pour viol pourrait donner un concert ? Je ne crois pas. En vertu de quoi Georges Tron peut-il continuer à administrer la ville dont il est maire alors qu'il est en prison ? Mais, me direz-vous, maire, ce n'est pas un métier, c'est une fonction. Soit. Enfin, il reçoit quand même de l'argent pour assumer cette fonction-là.
A partir de quand va-t-on se décider à asseoir ce principe de base selon lequel, dans un pays démocratique digne de ce nom, il ne serait possible d'être un élu de la République qu'avec un casier judiciaire vierge ?
Qui plus est, outre la législation, quid de la moralité ? Comment peut-on oser prétendre administrer une ville quand on n'est pas fichu d'administrer ses propres pulsions ? Il est vrai que la population de Draveil semble considérer que Georges Tron est un bon maire, tout comme Patrick Balkany est estimé à Levallois-Perret. Et alors ? Il devrait être irréprochable. Or, il a été condamné en appel en février dernier à 5 ans d'emprisonnement. D'accord, il s'est pourvu en Cassation, il continue de plaider son innocence. Peut-être même est-il innocent après tout. Mais dans ce cas, qu'il utilise toute son énergie à sa défense et laisse sa place à la mairie de Draveil.
S'il est innocent, il pourra se représenter aux prochaines élections, avec toutes ses chances de regagner son bureau de maire, la tête haute. Mais d'ici là, qu'il laisse sa place. Sans compter qu'en se maintenant ainsi à la mairie, il nuit à l'image de sa ville et à l'image de la France à l'étranger. Ce week-end, le Washington post - excusez du peu - publiait un long papier sur le sujet (à lire ici : A french mayor was convicted of rape. He's runinng his town from prison), soulignant notamment que Georges Tron avait été défendu par l'avocat Éric Dupond-Moretti, aujourd'hui ministre de la Justice.
Qu'un homme tel que Georges Tron puisse conserver son titre de maire et administrer sa ville depuis sa cellule de prison en dit à nouveau long sur le mépris que l'on continue d'avoir dans ce pays pour les femmes victimes de viols et d'agressions sexuelles. Toutes proportions gardées, c'est un peu le même genre d'histoire que celle d'Eric Zemmour, dont les fans estiment que si on l'accuse d'agression sexuelle, c'est pour ruiner ses chances de venir président de la République. Peu importe à leurs yeux qu'il soit ou non coupable de ce dont on l'accuse. On remarquera d'ailleurs que s'agissant de ce dernier, malgré les accusations dont il est l'objet - même si, en effet, aucune plainte n'a à ce stade été déposée contre lui -, il conserve sa place à l'antenne de CNews. La France serait donc ce pays qui balaie d'un revers de main les accusations des femmes et maintient en position de pouvoir ceux qu'elles désignent comme des agresseurs. On ne portera pas atteinte aux trajectoires politiques, aux destins de pouvoir de ces hommes-là en révélant leurs attitudes vis-à-vis des femmes, nous dit-on, au fond. Décidément, les agresseurs ont de beaux jours devant eux.
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