jeudi 5 novembre 2020

Egalité salariale : au-delà des choix politiques, toute une éducation à revoir

Au cas cela vous aurait échappé, depuis hier, mercredi 4 novembre à 16h16, mesdames, vous travaillez gratuitement. GRA-TUI-TE-MENT. Jusqu'au 31 décembre prochain, les hommes continuent de travailler pour gagner de l'argent, mais pour vous, c'est fini*. Comme chaque année, le collectif féministe Les Glorieuses a marqué symboliquement ce moment, le "4 novembre, 16h16", pour dénoncer les écarts salariaux encore omniprésents entre les femmes et les hommes. Comment encore concevoir et justifier, en 2020, que les femmes, toutes choses égales par ailleurs, soient moins payées pour le travail qu'elles réalisent que les hommes ?


Depuis le printemps 2019, les entreprises de plus de 1.000 salariés doivent rendre public leur index de l'égalité salariale, calculé à partir de critères tels que l'écart de rémunération entre les femmes et les hommes ou encore le nombre de femmes parmi les dix plus hautes rémunérations de l'entreprise. Mais, de l'avis de Élisabeth Moreno, ministre déléguée en charge de l’Égalité entre les hommes te les femmes, et Élisabeth Borne, ministre du Travail, cela ne va pas assez loin. Aussi annoncent-elles que ce sont désormais les index des entreprises de plus de 250 salariés qui devront être calculés et rendus publics. Dont acte !

Insuffisant cependant selon Les Glorieuses qui militent pour ce qu'elles appellent "un plan de relance économique féministe" :

 

Mais le sujet est encore plus profond, il n'est pas que politique,il est culturel. Parlez-en avec n'importe quel DRH, n'importe quel recruteur, ils vous diront tous que lorsqu'il s'agit de parler salaire, les femmes sont moins âpres à la négociation que les hommes. Certaines études évoquent le fait que un quart des femmes ne négocient jamais leur salaire avec leur recruteur. En d'autres termes, elles acceptent sans sourciller le salaire qu'on leur propose. Si vous regardez votre parcours personnel, vous vous rappellerez sans aucun doute un épisode de recrutement vous concernant où vous n'avez pas cherché à obtenir plus. Je me souviens de cette fois où j'avais quitté un poste dans lequel je me sentais placardisée et où, lors de l'entretien d'embauche suivant, mon recruteur m'avait demandé : "quel était votre salaire précédent?" Bêtement, j'avais répondu et il avait alors tranché : "ok, ce sera votre salaire ici aussi". Je n'avais pas réagi, soulagée que j'étais d'avoir retrouvé un emploi rapidement. Et j'ai mis des mois à comprendre que je m'étais faite avoir sur toute la ligne. Mais le mal était fait. L'échange s'était fait du tac-o-tac, le recruteur était un homme pas particulièrement avenant ou sympathique, je n'étais pas sûre d'obtenir le poste. A aucun moment je n'avais ne serait-ce que pensé être en mesure de négocier. A ma place, un candidat masculin aurait été prêt à refuser le poste. 

Depuis tout petit, les hommes sont formés à la négociation, à la baston, à défendre leur bifteck. Les femmes, elles, sont enjointes à la modestie et à la discrétion. Elles ne doivent pas faire de vague. Si elles haussent le ton, on les accuse d'arrogance. Il n'y a donc pas de raison que cela se passe autrement dans le monde du travail, que ce soit dans la négociation salariale ou même le choix des métiers. Il est en effet reconnu que les hommes se dirigent spontanément beaucoup plus facilement vers les métiers les plus rémunérateurs que les femmes. Pour changer la donne et asseoir la place des femmes dans le monde du travail, il faut donc aussi revoir la façon dont on éduque les enfants. Il nous faut encourager nos filles à être ambitieuses, sûres d'elles. Elles doivent pouvoir être aussi bruyantes que les garçons. Elles ont le droit d'être en colère, elles ont le droit de réclamer. Elles sont aussi méritantes qu'eux.

* Date fixée chaque année en fonction des données Eurostat sur les différences salariales entre les femmes et les hommes.

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