En politique, tous les coups bas sont permis. On se chahute, on se court-circuite autant que de besoin et on cherche à destabiliser l'adversaire. Peu importe le fonds, tant que la forme a du panache !
Le Sénat est souvent vu comme la chambre aux allures de maison de retraite, pleine de messieurs richement vêtus qui cherchent à ce que l'ordre établi demeure, à ce qu'on ne perturbe surtout pas leur manière de faire et leur manière d'être. On est aussi volontiers conservateur (aujourd'hui, sur 348 élus au Sénat, 146 appartiennent au groupe des Républicains).
Ceci posé, on pourra toujours prétexter un hasard du calendrier, mais il n'est pas anodin qu'alors que Marlène Schiappa vient de présenter son projet de loi pour renforcer la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, le Sénat balance en retour de manivelle sa proposition de loi "pour une meilleure protection des mineurs victimes d'infractions sexuelles". Porté par Philippe Bas, ce sénateur qui fût, pour mémoire, ministre délégué à la Sécurité sociale, aux Personnes âgées, aux Personnes handicapées et à la Famille de 2005 à 2007 puis brièvement en 2007 ministre de la Santé et des Solidarités, ce texte a pour vocation de protéger "tous les mineurs", lit-on dans l'exposé des motifs. Et hop, une petite attaque à l'endroit de Marlène Schiappa qui fixe à 15 ans l'âge de consentement légal à une relation sexuelle.
"La moitié des victimes des
agressions sexuelles dans notre pays sont des mineurs", selon Philippe Bas qui ajoutait à l'occasion de la présentation du texte ce 27 mars, qu'il faut "protéger tous les enfants, et pas seulement une partie d’entre eux.
Une victime de quinze ans et un mois mérite la même protection
qu’une victime de quinze ans moins un mois."
Et hop, nouveau taquet à destination de Marlène Schiappa qui, présente lors de cette intervention, se défend : "J’ai
été amenée à la vie politique par un sénateur,
j’ai le plus profond respect pour le travail qui est mené par le
Sénat, je vous demande de respecter également celui du Gouvernement". Ambiance.
Et alors qu'il n'est pas question ce jour-là de son projet de loi mais de la proposition du Sénat, elle développe et défend point par point son texte.
D'aucuns voient dans cette histoire une course contre la montre que se livreraient le Gouvernement d'une part et le Sénat de l'autre. Quel texte sera voté en premier : celui qui protège les enfants des violences sexuelles ou celui qui protège les femmes ? Comme si l'heure était aux guerres de chapelles et qu'il n'était pas plus intéressant de traiter les deux sujets en bonne intelligence. Comme si les deux textes étaient fondamentalement contradictoires. Comme si on ne pouvait pas défendre simultanément les femmes et les enfants. Comme si on ne pouvait pas se concentrer sur ce dénominateur commun à ces deux textes : la violence.
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