Dans la série harcèlement sexuel, il se passe des trucs pas inintéressants ces jours-ci. Peut-être que cela vous aura échappé, mais Patrick Bruel est visé par une triple accusation, émanant de trois masseuses professionnelles (l'une en Corse, la seconde à Cannes et la dernière à St-Barthélémy) qui affirment que notre Patrriiiiiiccccckkkk national aurait eu des gestes et paroles déplacés lorsque chacune de ces trois femmes aurait procédé à un massage. Chaque fois, le chanteur aurait refusé de porter le sous-vêtement jetable obligatoire en pareilles circonstances, exigeant d'être nu et il aurait réclamé des massages d'ordre intime. Les trois femmes disent avoir refusé.
Bref. Ce n'est pas tellement cela qui semble digne d'intérêt. Mais bien plus les réactions affligeantes que cela entraîne. Parce que c'est de Patrick Bruel qu'il s'agit, on n'y croit pas. Comment un homme d'une telle importance s'abaisserait-il à de telles pratiques, quand il peut avoir dans son lit toutes les femmes qu'il désire ? Pourquoi risquerait-il que sa réputation soit salie ? Ces masseuses ne seraient que des femmes attirées par l'argent qu'un tel scandale peut leur rapporter.
Les gens ont manifestement la mémoire courte. Quand l'affaire DSK a éclaté, personne n'y croyait. Pas plus qu'aux débuts de l'affaire Weinstein. Ok, dans le cas présent, l'homme dénoncé a un physique plus avantageux que les précédents. Mais qu'importe. Ça ne le rend pas innocent pour autant.
Dans cette affaire, les masseuses sont nécessairement des menteuses. On leur reproche d'avoir attendu longuement - hormis dans le cas de la femme en Corse -, considérant que si l'on est victime de tels agissements, on a nécessairement besoin de les dénoncer de suite. C'est vrai, c'est tellement facile d'aller porter plainte, de risquer de perdre son emploi pour ne pas entacher la réputation de l'établissement, de voir son nom sali, etc. Au motif que Patrick Bruel serait toujours un peu considéré comme le gendre idéal, on ne peut pas imaginer un seul instant qu'il puisse avoir ce type de comportements. En pareilles circonstances, la femme est nécessairement coupable. On ne va pas tarder à entendre que les masseuses sont des aguicheuses.
Peu importe en un sens qu'il soit coupable ou non de ce dont on l'accuse. Ce que cette affaire dit de notre société et du regard que l'on porte sur les autres, de nos œillères, de nos jugements à l'emporte-pièce, est assez consternant. Quand, en 2016, l'américaine Amber Heard divorce de l'acteur Johnny Depp et l'accuse de violences conjugales, parce qu'il s'agit de lui, tout le monde considère que forcément, c'est Amber Heard qui ment. Lui est forcément au-dessus de tout soupçon. Il est un acteur fantastique, il est beau, populaire, aux yeux de tous, il ne peut pas être violent. L'opinion publique est globalement de son côté à lui. Et on accuse Amber d'arrivisme, on estime qu'elle n'en veut qu'à son argent.
En 2019, alors que la parole s'est libérée, que chacun dénonce les violences de tous ordres faits aux femmes, il reste un mystère : quand c'est un homme public qui est visé, on n'y croit pas. Et on tombe à pieds joints dans les limites de la sororité et du combat pour la défense des femmes. En pareilles circonstances, les accusatrices sont des salopes, leur parole est méprisée. La meute est lancée. La place publique a tranché.
S'il est coupable, pour trois femmes qui accusent, combien se taisent ? S'il est coupable, combien ont accepté ses demandes, par peur de perdre leur emploi ? S'il était un homme ordinaire, on se serait déjà posé ces questions-là. Mais ce n'est pas un homme ordinaire, c'est un homme médiatique, c'est un homme de pouvoir, c'est un homme qui a de l'argent, c'est un homme qui a des relations, c'est un homme qui est adulé ...
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