Cet été, j'ai lu "La femme gelée", de l'incroyable Annie Ernaux. Si vous ne le connaissez pas, je vous conseille vraiment la lecture de cet ouvrage. Et comme il n'y a pas meilleure façon de vous y encourager que comme cela, je crois, voici quelques citations, tirées de ce livre :
« Être une petite fille c’était d’abord être moi, toujours tellement grande pour son âge, costaude heureusement malgré sa mine blanchette, un petit bidon en avant, pas de taille jusqu’à douze ans. La jupe ne tiendra pas sans bretelles assure la couturière, ou une ceinture serrée « Des bretelles, qu’elle soit à l’aise ». Rien que des vêtements pour être à l’aise avec en plus l’avantage qu’ils ont de durer longtemps. La coquetterie, les chatteries, les sourires coquins, les larmes pour attendrir, j’ignore complètement. Ma mère juge sévèrement les « faiseuses d’embarras », appelle simagrées les pleurs, « tu pisseras moins cette nuit ».
« Faire plaisir. Après tout qu’est-ce que ça peut bien faire d’aller voir El perdido plutôt que L’année dernière à Marienbad, il a le droit d’aimer les westerns, j’irai voir Resnais sans lui. Parce que réciprocité, zéro. Et je modelais mon corps comme ils voulaient, je t’aime en noir, fais-toi un chignon, tu serais bien avec une robe violette. Docile, cloche, mais encore trop discutailleuse, agressive, je veux leur faire sentir que je ne suis pas dupe, je suis comme tu veux, chignon, etc. mais ça me fait chier et tes westerns m’emmerdent. Comme conduite braque, il n’y a pas mieux. »
« Mon nom, celui que j’ai appris à écrire lentement, peut-être le premier mot que mes parents m’ont obligée à orthographier correctement, celui qui faisait que j’étais moi partout, qui claquait lors d’une punition, resplendissait sur un tableau de résultats, sur les lettres de ceux que j’aimais, il a fondu d’un seul coup, Quand j’entends l’autre, plus bref, j’hésite quelques secondes avant de me l’approprier. »
« Je ne veux pas être une emmerdeuse, est-ce que c’est vraiment important, tout faire capoter, le rire, l’entente, pour des histoires de patates à éplucher, ces bagatelles relèvent-elles du problème de la liberté, je me suis mise à douter ».
« Organiser, le beau verbe à l’usage des femmes, tous les magazines regorgent de conseils, gagnez du temps, faites ci et ça, ma belle-mère, si j’étais vous pour aller plus vite, des trucs en réalité pour se farcir le plus de boulots possible en un minimum de temps sans douleur ni déprime parce que ça gênerait les autres autour ».
« Quelle tâche un homme est-il obligé de se coltiner, tous les jours, deux fois par jour, simplement parce qu’il est homme ».
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