J'avais prévu d'écrire sur l'index d'égalité salariale aujourd'hui, ce sujet hyper fun qui oblige depuis cette semaine les entreprises de plus de 50 salariés à rendre publics les écarts de rémunération entre femmes et hommes, la répartition des augmentations et des promotions, etc. Sujet un tantinet barbant mais ô combien important dans ce vaste chantier qu'est la recherche de l'égalité entre femmes et hommes dans la société... Et puis j'ai allumé la radio, et j'ai écouté Charlotte Gainsbourg parler de son père sur France inter. Cela fait précisément 30 ans aujourd'hui qu'il est décédé. Alors, on aime ou n'aime pas le personnage, il y a matière à critiquer, c'est le moins que l'on puisse dire. De la même manière, on n'aime ou n'aime pas Charlotte Gainsbourg, je sais bien qu'elle ne fait pas l'unanimité..
Charlotte Gainsbourg, c'est celle qui sait d'où elle vient, celle qui a conscience d'être doublement "fille de", celle qui a compris la chance qu'elle a eue de naître dans cette famille-là, d'être celle qui porte l'héritage. Mais c'est aussi cette femme qui comprend les reproches faits à son père, qui admet sans réserve que ses provocations sont parfois allées trop loin - on se souvient de cette rencontre avec Whitney Houston, ou de ce billet de banque qu'il avait brûlé face caméra. Dans l'émission Boomerang ce matin, elle raconte qu'à l'école, d'autres enfants n'ont pas été tendres avec elle quand Serge commettait ses frasques. Mais pour elle, l'affaire était entendue : ce Serge-là était une personnalité publique et ce qu'il faisait pour provoquer et amuser les médias ne la regardait pas. "Je n'avais pas à m'en mêler. Tout le côté public, c'est pas mes oignons". Pour elle, ce qui importait, c'est qui il était à la maison. C'est son côté rieur, son côté showman, son côté "clown pour enfants", sa part d'enfance. "On n'a pas fini de jouer ensemble", dit-elle avec tendresse. Elle admire toutefois cette autre partie de lui, que l'on connaît mieux : il était très moderne, avec une "rigueur très à l'ancienne", lui qui avait depuis toujours baigné dans la musique classique et la poésie. Et puis, "il était perfectionniste mais il fallait que nous, on ne le soit pas". Elle fait la part des choses entre qui était son père dans l'intimité et qui il était publiquement. Elle s'attache au premier et elle évite le second. Elle raconte : "Depuis 30 ans, je zappe, dès que je l'entends, dès que je le vois à la télé". Elle estime qu'il était provocateur parce que c'était l'outil qu'il avait trouvé pour combattre sa timidité maladive. Elle a hérité de sa timidité, mais elle ne l'a pas combattue de la même façon.
Elle en parle avec pudeur, avec recul et elle raconte aussi la difficulté qu'il y a à être la fille de ce monument de la chanson française. Elle explique que lorsqu'elle est aux États-Unis, elle a la maîtrise de son père, elle convoque son souvenir quand elle le choisit. Il n'est pas omniprésent, elle gère mieux cette filiation et cet héritage. En France, être la fille de Serge Gainsbourg est une obligation, on la ramène sans cesse à lui. Au bout de trente ans, elle gère cette contrainte plus aisément mais, dit-elle, "quand c'est des moments où je n'ai pas les épaules, c'est encore compliqué". Être la fille de Gainsbourg est tour à tour un cadeau et un fardeau, même 30 ans après sa mort.
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