vendredi 12 juin 2020

Craquages en série au pays des parents d'élèves

Depuis trois mois, ils ont enfilé une cape d'enseignant, à superposer avec leur cape de parent, et leur cape professionnelle. Par la force des choses, il a fallu composer. Se débrouiller. Avancer à tâtons. Trouver des soupçons de pédagogie en eux. Les parents ont réalisé le travail mené à longueur d'année par les enseignants. Une blague a circulé des semaines durant sur les réseaux sociaux, qui disait en substance : "les parents réalisent enfin que les enseignants ne sont pas le problème". Si ce ne sont les enseignants, ce sont sans doute les enfants... ces petits trésors que l'on aime tant et que l'on préfère encore quand ils sont endormis. Ces chérubins qui mettent nos nerfs à dure épreuve. Tous les parents le disent : au fond, le confinement, ça va un temps. En septembre prochain, si la rentrée scolaire le permet, tous seront ravis de confier leurs enfants au corps enseignant.

Depuis quelques semaines, certains enfants ont repris le chemin de l'école, mais ils ne sont pas si nombreux. Et beaucoup de parents commencent à saturer. Les semaines avançant, c'est la Bérézina : les parents, qu'ils aient ou non une activité professionnelle, jettent l'éponge en masse. Ils en ont ras la casquette. Ils disent : "ça ne passe pas. Ma fille refuse obstinément de travailler à la maison, de se concentrer. J'ai tenu des semaines mais maintenant, je craque. Je laisse tomber, tant pis". "J'ai tenu bon pendant des semaines mais  trop c'est trop". "Je me concentre sur le français et les maths et si mon gamin ne veut pas faire le reste, eh bien on ne fait pas". "La semaine, on laisse Lisa travailler seule et on reprend tout avec elle le week-end, ça nous prend un temps fou. Du coup on laisse passer pas mal de choses". "J'avais l'impression de passer mon temps à lui hurler dessus donc autant dire que ça ruinait notre relation". "On a fait les devoirs en 20 minutes à l'oral".

Une illustration de Caroline Gaujour

Au début, c'était drôle, c'était comme un jeu. Et le temps passant, les choses deviennent compliquées pour tout le monde. La situation tape sur les nerfs des parents, les enfants se sont lassés, ils ont du mal à se concentrer, à rester motivés. Les enseignants s'en rendent bien compte qui ont depuis quelques semaines changé leur communication, multipliant les messages d'encouragement. 

La question qui se pose maintenant, c'est de savoir si cela aura changé quelque chose dans la relation des parents avec leurs enfants. Une fois que la vie aura retrouvé son cours normal, que restera-t-il de cette période dans les mémoires familiales ? Est-ce que les enfants regarderont leurs parents différemment, et vice-versa ? Les liens tissés seront-ils plus forts ? Ou au contraire, les incompréhensions et tensions de ce trimestre écoulé laisseront-elles des traces indélébiles ?

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