lundi 22 janvier 2018

Où il est question du devoir des pères à être là...

L'arrivée de bébé, ce moment où tout bascule dans ton couple et dans ta vie. 
En 2018, en France, on choisit si, quand et avec qui on souhaite avoir un ou des enfants. De manière générale, c'est un choix qui s'opère à deux. Et pourtant. Si ce choix est selon toutes vraisemblances une décision partagée en couple, elle se vit différemment selon que l'on est la mère ou le père de l'enfant. 

"La naissance d'un enfant est le plus souvent un non-évènement dans la vie professionnelle des hommes, alors qu'elle bouleverse profondément la vie des femmes", écrit Brigitte Grésy dans son "Petit traité contre le sexisme ordinaire" (lire aussi ici). Mais il n'y a pas que la sphère professionnelle de votre vie qui se trouvera chamboulée. Tout votre être et votre raison d'être le seront. Interviewée dans le cadre d'un podcast Arteradio (écouter ici : Papa où t'es ? ), Amandine raconte : "C'est peut-être en devenant mère que j'ai le plus souffert des inégalités de genre (...). Tout à coup, je suis devenue une mère à 300% alors que j'avais fait un projet d'enfant avec mon conjoint". Subitement, tout tourne autour de sa relation forcément fusionnelle avec son bébé, tandis que le père poursuit sa vie presque comme si de rien n'était, accaparé par un projet professionnel qui le tient hors du foyer au maximum. Amandine pète les plombs et réalise que toute la société s'arrange pour que les pères soient maintenus à distance des enfants. "Les professionnels s'adressaient systématiquement à moi", remarque-t-elle par exemple. 

Confirmation faite par la doctorante en sociologie Anne-Sophie Vozari selon qui "les pères sont peu considérés comme des pères mais sont d'abord considérés comme les conjoints des mères". D'ailleurs, on invite de nos jours les femmes à laisser une place aux pères, comme si elles étaient les responsables du fait que les pères sont peu investis. En cause, peut-être, cette idée que parce que c'est la femme qui porte l'enfant et lui donne la vie, il va de soi que c'est à elle que revient le rôle de la personne qui prend soin et éduque le petit. Tant que l'on verra la parentalité sous le prisme de ce lien particulier entre mère et enfant, on occultera le fait que le père aussi a un lien biologique fort avec sa progéniture. 

En ce sens, le congé paternité revêt une symbolique peut-être essentielle car les fondements de vie de famille s'installent dans les premiers jours qui suivent la naissance du bébé. Ainsi, la dessinatrice Emma suggère-t-elle qu'il y a nécessité à opérer un "glissement sémantique du plaisir du père, du droit du père à être là au devoir du père à être là" pendant les premières semaines de l'enfant. Par la force des choses, le père serait amené à plus assumer son rôle de père que s'il y est simplement invité. C'est cette symbolique qui a failli tout gâcher entre Amandine et son conjoint Anthony. Après être passés par la case thérapie de couple, ils sont repartis du bon pied. "Des tâches que je ne voyais pas se sont éclairées d'un coup", reconnaît Anthony. Il ajoute : "J'ai compris que le partage des tâches, ce n'est pas aider, c'est faire chacun des tâches. Ce n'est pas elle qui régente la maison". Mais chassez le naturel, il revient au galop. C'est plus fort que lui, Anthony dit : "Etre obligé d'acheter des couches, ça n'a pas grand intérêt". Ok, mais ça n'en a pas plus pour Amandine que pour lui...

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