jeudi 17 mai 2018

Projet de loi Schiappa : beaucoup de bruit pour rien ?

L'Assemblée nationale a adopté en première lecture le projet de loi de Nicole Belloubet, garde des Sceaux et Marlène Schiappa, secrétaire d'Etat chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, portant sur la lutte contre les violences sexuelles et sexistes. Ca s'est passé mardi soir, ça a duré des heures et des heures, et ce fut plutôt électrique. 

En cause, la rédaction de l'article 2 de ladite loi dont la formulation un peu ambigue laissait planer un doute sur le sens du texte, selon les députés de l'opposition, lesquels souhaitaient qu'il soit écrit noir sur blanc que s'agissant des mineurs de quinze ans, il y avait de facto présomption de non-consentement à l'acte sexuel avec un adulte. Or, la formulation retenue est celle-ci :
« Lorsque les faits sont commis sur la personne d’un mineur de quinze
ans, la contrainte morale ou la surprise peuvent résulter de l’abus de
l’ignorance de la victime ne disposant pas de la maturité ou du
discernement nécessaire pour consentir à ces actes. » 
 
A ces députés-là, qui contestent l'écriture du texte et non le concept, Marlène Schiappa a rétorqué, en colère : "Vous dites aux agresseurs qu'ils seront désormais moins punis alors que le sens de ce projet de loi, c'est de punir toutes les violences sexistes et sexuelles". Elle dénonce "les mensonges qui sont faits autour de ce projet de loi". Elle ne défend pas son texte sur le fond, ne cherche pas à débattre de façon constructive avec les députés, mais renvoie la faute à ses détracteurs. Décidément, Marlène Schiappa, si vous n'êtes pas avec elle, c'est donc que vous êtes contre elle (lire ou relire ici : Marlène Schiappa : quand les langues se délient).

Photo AFP

Pour le reste, si l'on espérait un texte législatif d'envergure sur le sujet des violences sexuelles et sexistes, alors on peut encore attendre. Peu de thématiques sont en effet traitées dans ce projet de loi qui ne comprend que cinq articles :
- article 1 : allongement du délai de prescription concernant les viols sur mineurs, délai qui passe de 20 à 30 ans
- article 2 : c'est celui copié-collé ci-dessus
- article 3 : lutte contre le harcèlement groupé, notamment le harcèlement via les réseaux sociaux
- article 4 : instauration de l'outrage sexiste
- article 5 : intégration de cette loi dans la législation de l'Outre-mer.

(Pour consulter le texte tel qu'adopté ce mardi 15 mai, ça se passe ici : Projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes).

De là à dire que la montagne a accouché d'une souris, il n'y a qu'un pas.

Marlène Schiappa avait confié à Paris-Match, en mars dernier : "Les trois quarts de ma feuille de route, c'est fait"...

Lire aussi :
- Marlène Schiappa : quand les langues se délient
- Harmonisation des congés maternité : patience...
- La PMA est un sujet important... mais pas urgent
- Violences sexuelles : guerre de chapelles entre le gouvernement et le Sénat

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